Rédaction : Annie Girard
Paru dans Le Magazine Coeliaque Québec, Vol 39 N° 3 - Hiver 2022
Apprendre qu’on est atteint de la maladie coeliaque transforme le reste de la vie. Surtout lorsqu’on est à l’aube de la retraite. Donald Cameron l’a vécu. Le fringant centenaire ne s’est toutefois jamais laissé embêter par son état. Son attitude exemplaire nous rappelle l’importance de garder le moral malgré les épreuves de la vie. Et ce, quel que soit notre âge.
À l’approche de ses 40 ans, Donald Cameron avait des soucis de santé. Ils n’étaient pas envahissants, mais toujours présents et l’empêchaient de vaquer à ses occupations. Perte de poids, anémie, fatigue récurrente, infections à répétition, le père de 10 enfants se promenait d’un spécialiste à l’autre sans toutefois obtenir un diagnostic clair. Quand sa fille coeliaque a assisté à un congrès de la Fondation québécoise de la maladie coeliaque (le nom de Coeliaque Québec au début des années 1980) pour en apprendre davantage, elle a compris que les symptômes pouvaient varier d’une personne à l’autre. Elle a donc fortement suggéré à son père de consulter un gastroentérologue pour subir des examens en ce sens. Enfin, à 64 ans, grâce à la vigilance de sa fille et après plus de 30 ans d’inconforts, l’ingénieur de formation avait l’heure juste sur les malaises qui ruinaient son quotidien. L’homme qui s’endormait à l’occasion au travail était rendu si faible. Il ne retenait plus aucun nutriment, était maigre et dénutri. Il pouvait désormais espérer prendre du mieux en modifiant ses habitudes alimentaires. À la fin des années 1980, il était complexe d’avoir accès à des aliments SANS GLUTEN (SG) au supermarché, mais il a trouvé des solutions avec positivisme et en faisant preuve de résilience. Son bien-être en dépendait et il y tenait.
Enfin, la liberté!
Une fois le diagnostic établi, Donald Cameron s’est senti empreint d’un sentiment de soulagement. « Je m’empêchais souvent de sortir de peur d’avoir des diarrhées, c’était terminé, j’étais libre!, explique-t-il. Ça a été une révélation. Il suffisait que j’adapte mon alimentation pour que je puisse revivre un peu plus normalement. Et, surtout, reprendre des forces et ne plus être constamment fatigué. » Ça a pris plusieurs mois, la santé tout comme l’énergie et l’endurance sont revenues grâce à une alimentation adéquate. Pour l’amateur d’art et d’horticulture qui peignait et jardinait dans ses temps libres, il était maintenant possible de goûter à nouveau au bonheur.
J’ai 100 ans, je suis fier de ce que j’ai accompli. Être coeliaque demeure trop souvent compliqué aux repas. Je me concentre sur le positif. Je peux manger beaucoup d’aliments. Je suis en forme et actif. Je danse, je peins et je chante. Je suis choyé par mes proches. J’ai vraiment une belle vie!
Une épouse attentionnée
En 1986, alors que les épiceries offraient peu de produits SG et de mets tout prêts, il n’y avait qu’une option : celle de cuisiner. Heureusement, Donald Cameron pouvait compter sur son épouse Solange qui veillait à respecter sa diète stricte. Toute la famille mangeait SG. C’était plus simple et le meilleur moyen d’éviter la contamination croisée qui aurait pu causer des désagréments. « Solange participait à des rencontres informatives pour en apprendre plus sur ma maladie et sur les restrictions alimentaires, note-t-il. Elle revenait avec des trucs à surveiller, des idées de repas, me parlait des nouveautés sur le marché et s’en procurait. Elle a été d’un précieux soutien, je me portais bien grâce à elle. »
Au four à 85 ans
Il y a dix ans, celle qui partageait sa vie depuis toujours est malheureusement décédée. « J’ai donc dû apprendre à cuisiner, car je manquais de connaissances, précise l’homme de 100 ans. J’ai appris les bases dans une école de Charlesbourg et j’ai développé des trucs pour travailler avec des farines qui conviennent à mes besoins ainsi que d’autres ingrédients pour concocter mes repas. » Le nouvel élève s’est également muni de plusieurs livres de recettes SG et il a pratiqué. Ces heures de formation lui ont permis d’acquérir des connaissances tout en développant une meilleure confiance. Aujourd’hui, il trouve facilement les ingrédients et aliments adaptés aux restrictions de sa maladie coeliaque. « Ils sont beaucoup plus nombreux et accessibles maintenant qu’à l’époque. C’est toute une chance d’en avoir autant à portée de main. »
Maintenant, Donald Cameron cuisine des biscuits, des gâteaux, des sauces et des repas complets. Il est autonome et se débrouille fort bien. Il prépare d’ailleurs tous ses déjeuners et ses soupers dans son appartement. Il prend le dîner à la cafétéria de la résidence où il habite, mais il doit parfois compléter chez lui puisque l’offre ne convient malheureusement pas à sa diète. Par chance, la vue sur le fleuve et le magnifique Château Frontenac qu’il contemple depuis sa résidence à Lévis compensent le désagrément. Il a aussi délaissé les visites au restaurant qui étaient devenues compliquées à gérer et trop risquées pour le plaisir qu’il en retirait. « À mon âge, même si j’ai encore mon permis de conduire, je n’ai plus tant envie d’aller au restaurant, c’est exigeant et stressant. J’aime mieux manger chez moi ou à la cafétéria, c’est plus sécuritaire. » L’homme actif a toujours su entretenir de l’espoir quant aux impacts de sa maladie sur sa vie. Tout n’est pas triste. Au contraire, il met le cap sur le fait qu’il est encore là après toutes ces années, sans aucune souffrance. Il est plus en forme que jamais, il élabore des mets goûteux qu’il savoure avec joie et fierté. Il demeure un exemple de résilience duquel il faut s’inspirer. Il a su transformer à son avantage son parcours parsemé d’embûches afin de s’assurer une vie plaisante pleine de liberté.
Un 100e anniversairePour son anniversaire, Donald Cameron a soufflé 100 bougies à quelques reprises et dégusté un gâteau SANS GLUTEN chaque fois. Sa famille lui a réservé une surprise avec une quarantaine d’invités dont ses enfants, plusieurs de ses petits-enfants et arrière-petits-enfants. Le directeur de la résidence, des élus municipaux et fédéraux ont aussi souligné l’événement marquant en présence d’un autre résident centenaire. À son âge, les célébrations durent plus longtemps. Donald Cameron a tout compris, il croque dans la vie et il en profite. Jamais il ne retournerait en arrière tellement son bien-être est grand. |